Une filière en construction, mais déjà en mouvement
Chaque année, le bâtiment génère près de 230 millions de tonnes de déchets, soit les deux tiers de la production nationale. Jusqu’à récemment, la majorité de ces matériaux — gravats, bois, plastiques, isolants — finissaient en décharge. La création de la filière REP vise à inverser cette logique : les producteurs de matériaux doivent désormais financer la collecte et le recyclage des déchets issus de leurs produits.
Depuis le début de l’année 2025, des centres de reprise gratuits se multiplient, soutenus par les éco-organismes agréés (Valobat, Ecominéro, Valdelia…). Ces structures assurent le tri, la valorisation et la traçabilité des flux. À Toulouse, un chantier participatif de rénovation a réemployé plus de 60 % des matériaux d’un immeuble de bureaux. À Nantes, une coopérative citoyenne collecte le bois et le plâtre pour les transformer en isolants. Ces initiatives locales incarnent la dynamique naissante d’une filière encore en apprentissage.
Un changement d’échelle encore à consolider
Malgré ces avancées, la REP Bâtiment reste en phase de rodage. Les professionnels évoquent un manque d’espaces de stockage, une logistique à perfectionner et des coûts de tri encore élevés. Certains matériaux, notamment les composites ou les isolants multicouches, sont difficiles à recycler faute de solution technique.
Les éco-organismes visent pourtant une réduction de 70 % de l’enfouissement d’ici 2030. Pour y parvenir, la filière devra renforcer le maillage territorial, généraliser les diagnostics ressources avant travaux et mobiliser davantage les maîtres d’ouvrage.
Au-delà des chiffres, la REP Bâtiment introduit un changement culturel : les déchets deviennent une ressource à part entière. Les “chantiers citoyens” et les plateformes locales de réemploi pourraient bien dessiner les contours d’un bâtiment plus circulaire, collaboratif et durable.