Alors que les vagues de chaleur deviennent plus fréquentes et que les départs de feu se multiplient, ces avions, surnommés les “pélicans” par les observateurs, sont de plus en plus sollicités. Pourtant, leur âge moyen dépasse les 30 ans, et leur maintenance pèse lourdement sur la capacité opérationnelle de la flotte française.
Une efficacité menacée par l’usure et la corrosion
Un rapport parlementaire publié le 2 juillet dresse un constat préoccupant : les opérations de maintenance des Canadair se multiplient au fil des ans. En cause, une corrosion accrue de leurs structures, accentuée par l’usage de l’eau de mer, moins adaptée que l’eau douce à laquelle ils étaient initialement destinés. Ces appareils avaient été conçus pour opérer dans les vastes lacs du Canada. En France, ils se ravitaillent souvent en mer Méditerranée, avec pour conséquence une dégradation prématurée.
La disponibilité réelle de ces avions en pleine saison des feux reste floue. “La direction générale nous a fourni la disponibilité à l’année, mais pas durant la saison des feux”, déplore Sophie Pantel, députée socialiste et co-rapporteure du document, interrogée par franceinfo. Une opacité qui interroge, alors que les incendies pourraient encore s’intensifier dans les semaines à venir.
Le remplacement des Canadair : un défi encore non résolu
Face à ces constats, la question du renouvellement de la flotte devient urgente. Mais aucune solution de remplacement concrète n’est encore en place. Si le constructeur canadien De Havilland Canada a annoncé vouloir relancer la production de nouveaux modèles modernisés, appelés DHC-515, leur livraison ne devrait pas intervenir avant plusieurs années.
En attendant, la France dépend toujours de ses anciens appareils, avec les risques que cela comporte. Le ministère de l’Intérieur a bien initié une réflexion stratégique, mais les négociations budgétaires et la complexité industrielle freinent toute avancée rapide.
Une pression accrue sur les équipes de terrain
Dans ce contexte, les pompiers au sol et les pilotes d’aéronefs doivent redoubler d’efficacité avec des moyens parfois fragilisés. La saison 2024 avait déjà montré les limites du système, avec plusieurs Canadair cloués au sol pour entretien, alors même que la canicule frappait le Sud-Ouest.
Le début de l’été 2025 confirme cette tendance. Le changement climatique, en accentuant la sécheresse des sols et la multiplication des départs de feu, transforme les incendies estivaux en un phénomène plus long, plus intense, et plus difficile à contenir. Dans ce nouveau contexte, la disponibilité des moyens aériens devient cruciale, voire vitale.
Un enjeu national en suspens
Pour les autorités, l’urgence est claire : il faut anticiper, investir, et communiquer davantage sur l’état de la flotte aérienne. La succession des incendies majeurs survenus ces dernières années – de la Gironde en 2022 à la Provence en 2023 – laisse craindre une répétition si aucun virage n’est pris.
La modernisation de la sécurité civile devient donc un enjeu national, au croisement des politiques environnementales, budgétaires et industrielles. Mais tant que les successeurs des Canadair ne sont pas là, la France devra continuer de compter sur une flotte vieillissante, que les premières fumées de l’été mettent déjà à rude épreuve.