Dès aujourd’hui, la planète vit à crédit

Dès aujourd’hui, la planète vit à crédit
Le 24 juillet marque cette année le Jour du dépassement mondial, soit la date à partir de laquelle l’humanité a consommé l’ensemble des ressources naturelles que la planète peut renouveler en un an. Si ce seuil recule légèrement par rapport à 2024, la tendance reste inquiétante, alertent le WWF et le Global Footprint Network.

Un crédit écologique de plus en plus coûteux pour la planète

Chaque année, le Jour du dépassement de la Terre agit comme un signal d’alarme mondial. Cette date symbolise le moment où la consommation humaine en ressources naturelles dépasse la capacité de régénération de la planète. En 2025, ce point critique est atteint ce 24 juillet, contre le 1er août en 2024. Une amélioration en apparence, mais qui ne doit pas masquer la gravité de la situation.

Selon les calculs du Global Footprint Network, nous vivons actuellement comme si nous avions 1,8 planète à disposition. Cela signifie que l’humanité utilise 80 % de ressources en plus que ce que la Terre peut durablement produire chaque année. Ce déséquilibre nous entraîne dans une spirale de surconsommation qui met en péril l’équilibre climatique, la biodiversité et la capacité de notre planète à nous nourrir.

Une consommation française toujours excessive

Si tous les habitants de la Terre consommaient au rythme des Français, le Jour du dépassement aurait été atteint dès le 19 avril 2025. Ce chiffre illustre à quel point le mode de vie occidental reste énergivore et insoutenable. La France, comme de nombreux pays industrialisés, continue de présenter une empreinte écologique parmi les plus élevées du globe, principalement en raison de ses modes de production, de son agriculture intensive, et de sa dépendance aux ressources importées.

Les alertes se multiplient, notamment du côté du WWF France, qui insiste sur l’urgence d’un changement structurel de notre modèle économique et de consommation. Pour l’ONG, la transformation de notre alimentation et de notre agriculture constitue l’un des leviers les plus puissants pour freiner le dérèglement climatique et réduire l’empreinte écologique.

Un recul en trompe-l’œil

Le léger recul du Jour du dépassement de 8 jours en 2025 ne doit pas être interprété comme une victoire. Il s’explique en partie par une actualisation des données scientifiques, comme la révision à la baisse de la capacité de séquestration carbone des océans. Autrement dit, ce décalage résulte moins d’une amélioration concrète des comportements que d’un affinement des outils de mesure.

Par ailleurs, cette date reste un indicateur composite, basé sur la production de ressources renouvelables et les émissions de CO₂. Or, même en 2025, la déforestation progresse, les sols s’érodent, la biodiversité s’effondre et les événements climatiques extrêmes se multiplient. À ce rythme, le crédit écologique ne cesse de s’élargir et hypothèque les générations futures.

Agriculture, alimentation : deux leviers pour inverser la tendance

D’après le WWF, plus de la moitié de l’empreinte écologique mondiale est liée à notre alimentation. La production de viande, la déforestation induite par l’agriculture intensive, l’utilisation massive d’eau pour l’irrigation et les pertes alimentaires constituent des points de rupture. Une réorientation vers des régimes plus végétaux, des circuits plus courts, et une gestion durable des sols est donc indispensable.

En France, malgré quelques avancées sur les pratiques bio et l’agroécologie, les surfaces cultivées de manière intensive restent majoritaires. Les politiques publiques peinent à imposer des changements profonds, malgré les incitations des scientifiques et des ONG. La question des ressources en eau, en particulier, devient de plus en plus sensible dans un contexte de sécheresses à répétition.

Une mobilisation encore insuffisante

Face à cette urgence écologique, les initiatives citoyennes se multiplient, mais elles restent marginales à l’échelle planétaire. Certains pays s’engagent dans des réformes structurelles – comme la Nouvelle-Zélande ou les pays scandinaves – mais le manque de volonté politique reste le principal frein au changement. Le modèle de croissance actuel, basé sur l’exploitation rapide des ressources, ne permet pas d’inverser durablement la tendance.

Le WWF plaide pour une approche systémique, intégrant les enjeux environnementaux dans l’ensemble des politiques économiques, industrielles et sociales. Le respect des limites planétaires ne doit plus être perçu comme une contrainte, mais comme une condition de survie pour les sociétés humaines.

Vers une sobriété choisie pour la planète ?

Le Jour du dépassement de la Terre est bien plus qu’un repère symbolique. Il incarne la contradiction entre notre modèle de développement et les limites physiques de notre planète. L’année 2025 nous montre que le changement est encore possible, mais que la marge de manœuvre se réduit. Reculer cette date, année après année, suppose des choix politiques courageux, un engagement citoyen fort et une redéfinition du progrès à l’aune de la sobriété.

La vraie question n’est pas de savoir jusqu’à quand la Terre pourra encaisser notre mode de vie, mais combien de temps encore nous accepterons d’ignorer l’évidence.