Chaudières biomasse : une filière clef en péril

Chaudières biomasse : une filière clef en péril
Depuis deux ans, le marché des chaudières biomasse, autrefois dynamique, connaît une chute brutale. En 2024, les ventes ont reculé de 45 %, pour ne totaliser que 9 230 installations sur l’ensemble du territoire. Cette tendance baissière, amorcée en 2023, s’est confirmée malgré une conjoncture énergétique pourtant favorable à ce type d’équipement.

Un recul sévère des chaudières biomasse

Alors que les prix du granulé de bois se sont stabilisés dès 2023, la logique voudrait que la demande reparte à la hausse. Pourtant, le marché s’est effondré. Ce paradoxe s’explique principalement par la réduction progressive des aides de l’État. Le dispositif MaPrimeRénov’, levier essentiel pour encourager les ménages à remplacer leurs vieilles chaudières par des modèles à énergie renouvelable, a été fortement amputé : –30 % en 2024, et une nouvelle baisse de 32 % prévue pour 2025.

Pour de nombreux foyers, cette réduction rend l’investissement dans une chaudière biomasse beaucoup moins attractif. Le coût moyen d’installation (entre 12 000 et 18 000 euros) devient difficile à absorber sans un soutien public significatif, même avec les économies d’énergie à long terme.

Une filière clef fragilisée malgré la transition écologique

Derrière ces chiffres, c’est toute une filière qui vacille. Constructeurs, distributeurs, installateurs, fournisseurs de combustibles… tous les maillons de la chaîne ressentent le contrecoup. Des entreprises spécialisées dans la fabrication d’équipements biomasse réduisent leur activité, voire licencient. Certains installateurs se tournent vers d’autres types de chauffage, moins vertueux mais plus soutenus.

Le secteur, pourtant identifié comme stratégique dans la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), se retrouve dans une situation de plus en plus critique. La PPE prévoit un développement massif des énergies renouvelables thermiques, et la biomasse devait y jouer un rôle majeur. Son affaiblissement remet donc en cause une partie des objectifs de décarbonation du parc résidentiel.

Une incohérence dans les politiques publiques ?

Cette crise pose la question de la cohérence de la stratégie énergétique française. Alors que le gouvernement martèle la nécessité d’accélérer la transition écologique, il réduit son soutien à une technologie éprouvée, largement disponible sur le territoire, et à très faible empreinte carbone.

Dans ce contexte, les associations de défense de la filière montent au créneau. La Fédération des Énergies Renouvelables (SER) alerte sur les conséquences à moyen terme : « Si rien n’est fait, le marché pourrait s’effondrer durablement, alors même que les besoins en alternatives aux énergies fossiles explosent. »

Des solutions encore possibles pour sauver les chaudières biomasse

Pour enrayer cette spirale négative, plusieurs pistes sont évoquées. Un réajustement du barème MaPrimeRénov’ pour les équipements biomasse pourrait relancer la dynamique. D’autres suggèrent d’introduire des bonus supplémentaires dans les zones rurales, où ces chaudières sont particulièrement adaptées.

Par ailleurs, une campagne de communication nationale sur les avantages économiques et environnementaux de ces solutions permettrait de redonner confiance aux ménages. À condition, bien sûr, que le soutien financier suive.

Un test grandeur nature pour la politique climatique

L’avenir des chaudières biomasse ne concerne pas seulement les professionnels du secteur. Il constitue un test grandeur nature de la volonté politique réelle de réussir la transition énergétique. Dans une période de tension sur les budgets publics, faire le choix de continuer à soutenir cette filière serait un signal fort envoyé aux citoyens, aux industriels et aux territoires.

Sans une réaction rapide, la France pourrait non seulement perdre un savoir-faire précieux, mais aussi prendre du retard sur ses engagements climatiques. À l’heure où chaque tonne de CO₂ évitée compte, affaiblir un outil aussi efficace que la chaudière biomasse pourrait bien être une erreur difficile à rattraper.