Deuxième industrie la plus polluante au monde après le pétrole, le textile pèse lourd dans la balance climatique et écologique. De la production des fibres à la gestion des déchets, son impact est massif. Pourtant, des leviers d’action existent pour inverser la tendance. Tour d’horizon des solutions concrètes pour une mode plus responsable.
Une industrie parmi les plus polluantes de la planète
L’industrie textile est aujourd’hui dans le viseur des experts en environnement. Selon l’ADEME, si rien ne change, elle pourrait représenter jusqu’à 26 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici 2050. Ce chiffre vertigineux englobe toute la chaîne de production : culture des matières premières, fabrication, transport, distribution et fin de vie des produits.
La pollution de l’eau est un autre fléau associé à ce secteur. Les teintures textiles seraient responsables d’environ 20 % de la pollution mondiale des eaux, en grande partie à cause de métaux lourds comme le plomb ou le mercure. Un exemple criant : la rivière Li, en Chine, jadis surnommée « Perle de la Chine », est aujourd’hui un symbole des dégâts environnementaux causés par l’industrie du denim.
Derrière le pétrole, un secteur extrêmement énergivore
Seule l’industrie pétrolière dépasse le textile en matière de pollution globale. Chaque année, le textile émet 1,2 milliard de tonnes de CO₂, un volume supérieur à celui des transports maritimes et aériens réunis. Cette empreinte carbone s’explique notamment par la culture intensive du coton, la fabrication énergivore des fibres synthétiques, le transport mondial et les traitements chimiques appliqués aux tissus.
La consommation d’eau atteint aussi des sommets : produire un simple t-shirt en coton peut nécessiter jusqu’à 2 500 litres d’eau. Quant au cachemire, il est l’un des textiles les plus polluants en raison de son fort impact carbone (près de 385 kg de CO₂ par kilo) et de sa consommation d’eau élevée.
Des matières premières plus respectueuses
Face à ce constat, une première piste consiste à se tourner vers des matières plus durables. Le coton biologique, le lin ou encore le chanvre consomment moins d’eau et d’énergie, tout en évitant les pesticides. D’autres alternatives innovantes comme le Tencel (issu de pulpe de bois) ou des textiles conçus à partir de déchets végétaux offrent aussi des perspectives intéressantes.
Les fibres recyclées ont également un rôle clé à jouer. Le polyester recyclé ou la laine récupérée permettent de limiter la production de déchets et l’extraction de ressources vierges.
Consommer autrement : moins, mais mieux
Le modèle actuel repose sur une surconsommation problématique. En moyenne, un consommateur achète 40 % de vêtements en plus qu’il y a quinze ans, tout en les conservant moitié moins longtemps. Pour réduire cet impact, il devient essentiel de privilégier des vêtements durables, de meilleure qualité, conçus pour durer.
Soutenir des marques éthiques, transparentes sur leurs conditions de fabrication et respectueuses de l’environnement, est un autre levier d’action puissant. Ces entreprises innovent pour réduire les gaspillages, limiter l’usage des ressources et intégrer des pratiques sociales responsables.
L’entretien : un geste clé souvent négligé
Réduire l’empreinte environnementale passe aussi par l’usage. Laver ses vêtements à basse température, espacer les lavages, utiliser des lessives écologiques et éviter l’adoucissant sont autant de gestes simples qui diminuent l’impact énergétique et la pollution de l’eau.
Réparer plutôt que jeter est également une démarche vertueuse. Depuis 2023, Refashion propose un « bonus réparation » pouvant aller jusqu’à 25 euros pour encourager les consommateurs à faire réparer leurs vêtements ou chaussures chez des professionnels agréés.
Faire vivre les vêtements autrement : l’économie circulaire
Une autre solution prometteuse réside dans l’économie circulaire. En France, environ un quart des vêtements dans les placards ne sont pas portés au cours de l’année. Plutôt que de les laisser prendre la poussière ou de les jeter, il est possible de les donner à des associations, de les vendre d’occasion, de les échanger ou même de les louer.
Les marques sont de plus en plus nombreuses à proposer des services de reprise ou de recyclage. Les textiles collectés peuvent ainsi être transformés en isolants thermiques ou en nouvelles fibres. Aujourd’hui, environ 55 % des vêtements mis sur le marché en France sont réutilisés, et un tiers recyclé, selon l’ADEME.
Fast fashion : la fausse bonne affaire
La mode ultra-rapide, incarnée par des géants comme Shein, Temu ou Asos, contribue largement à la surproduction textile. Leurs modèles économiques, basés sur des volumes massifs à bas prix, rendent toute durabilité impossible.
Face à cela, la seconde main se développe rapidement. Friperies, plateformes spécialisées et vide-dressings numériques permettent d’acheter des vêtements d’occasion de qualité. En 2022, 31 % des Français déclaraient avoir acheté un vêtement d’occasion, selon Statista. Un chiffre en constante augmentation.
S’informer pour mieux consommer
Savoir ce que l’on achète est un prérequis pour consommer responsable. Des outils existent pour s’y retrouver : les labels GOTS, Oeko-Tex ou Fair Wear garantissent des pratiques plus vertueuses. Des applications comme Good On You permettent d’évaluer les marques selon leurs engagements environnementaux et sociaux.
Agir à son échelle et sensibiliser son entourage
Changer ses habitudes, c’est bien. Encourager les autres à le faire, c’est mieux. Partager ces connaissances, parler des alternatives durables, et promouvoir une consommation raisonnée sont des gestes qui, multipliés à l’échelle collective, peuvent peser dans la balance.
Réduire l’empreinte environnementale de l’industrie textile n’est pas une utopie. C’est un défi que chacun peut relever, à condition de prendre conscience de son pouvoir en tant que consommateur. Moins mais mieux : tel pourrait être le nouveau mantra de la mode durable.