Vitesse sur autoroute : le gouvernement a-t-il oublié la Convention Citoyenne pour le Climat ?

Vitesse sur autoroute : le gouvernement a-t-il oublié la Convention Citoyenne pour le Climat ?
Le 3 avril 2023, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a demandé aux entreprises françaises d’inciter leurs salariés à rouler moins vite sur autoroute, pour limiter la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Or, cette réduction de la vitesse à 110 km/h sur autoroute faisait partie des trois propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat rejetées sans débat par Emmanuel Macron.

Rouler moins vite sur autoroute est aussi écologique qu’économique. Une étude récente le démontre sans ambiguïté : passer de 130 km/h à 110 km/h permet de réduire de 20 % la consommation d’un véhicule, et donc ses émissions de gaz à effet de serre. Le tout avec un impact assez réduit sur le temps de trajet, en particulier sur les distances de moins de 100 kilomètres.

Réduire la vitesse sur autoroute à 110 km/h, oui, mais seulement au travail

Dès lors, la proposition du gouvernement d’inciter les salariés à réduire leurs vitesse sur autoroutes dans leurs trajets professionnels et pour se rendre au travail semblait frappé du sceau du bon sens. Mais sa place dans le plan de sobriété, présenté le 6 octobre 2022, était incitative et réduite aux « agents publics utilisant leur véhicule de service lors de trajets professionnels non urgents ».

Ce 3 mars 2023, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, recevait des représentants des grandes entreprises, notamment celles du CAC40 et du SBF120 adhérentes de l’Association française des entreprises privées (AFEP), pour un exercice de bilan et perspective sur la sobriété énergétique du secteur privé.

Elle a distribué des bons points pour l’électricité et le gaz, avec d’importantes réductions de consommation des grandes entreprises, mais un mauvais point pour le carburant. Le secteur privé n’a pas réduit sa consommation d’essence et de diesel l’année dernière.

La ministre a donc proposé aux grandes entreprises d’inciter leurs salariés à adopter, eux aussi, le réflexe des 110 km/h sur autoroute. Elle propose même d’inscrire cette mesure dans les discussions de dialogue social afin « d’ancrer la sobriété dans le temps ».

Au moment de la Convention Citoyenne pour le Climat, la proposition avait été rejetée par Emmanuel Macron

Cette annonce, comme celle de l’automne pour les administrations, est symptomatique d’un manque de courage politique face à la question écologique. La mesure a une forte efficacité, reconnue, pourquoi la limiter à une incitation sur la base du volontariat et la transformer ainsi en « petit geste citoyen » plutôt que d’en faire une mesure perenne, généralisée à tout le territoire ?

Le plus ironique, c’est que cette réduction de la vitesse sur autoroute à 110 km/h figurait explicitement dans les 149 propositions remis par la Convention Citoyenne sur le Climat au président de la République en juin 2020. Et que la mesure avait fait partie, à l’époque, des trois rejetée par Emmanuel Macron sans justification (ses trois « jokers » comme il les avait appelé).

Près de trois ans après, son gouvernement semble se rappeler que réduire sa vitesse est écologique, sobre et bon pour le porte-monnaie. Mais, plutôt que d’en faire une loi, ou, à la limite, une incitation pour tous les citoyens, l’exécutif choisit d’en passer par les employeurs, comme s’il refusait d’en assumer les conséquences, limitant ainsi l’impact d’une telle mesure.